Maul Mornie à Hong Kong, juillet 2018

J’ai dit à de nombreuses reprises, y compris dans des interviews à quel point Maul Mornie, le fondateur du SSBD pouvait être une inspiration pour moi tant martialement qu’humainement d’ailleurs. Malgré cela, cela faisait déjà 8 années que je n’avais pas eu le plaisir de pratiquer sous sa direction. C’est donc avec un plaisir non dissimule que j’ai retrouvé Maul et sa pratique.

Je regarde les vidéos de Maul très régulièrement parce que j’apprécie particulièrement sa façon de bouger et le naturel qui s’en dégage, derrière l’apparente complexité des techniques réalisées. Cette complexité technique n’est pour moi qu’apparente, et je suis convaincu depuis des années que sa pratique s’articule autour de quelques points essentiels, et que le reste est à la limite de l’improvisation le jour du stage.

Et quel plaisir de voir que la pédagogie de Maul est passée a un niveau supérieur et qu’il présente aujourd’hui sa méthode de façon simple, accessible et systématique. Systématique oui car le SSBD est bien un système au sens le plus strict du terme. A un moment du stage Maul nous a précisé « si vous avez une solution par problème, vous êtes un très mauvais ingénieur. Une bonne solution est utilisable pour plusieurs problèmes ».

Comment cela se présente-t-il pédagogiquement ?

Maul nous a d’abord fait pratiquer trois attaques de base au couteau, sur un partenaire à distance de lame, et en exagérant les armés. C’est ce qu’il appelle les points de référence : pendant que mon partenaire travaille son attaque, j’apprends à quelle distance il peut me toucher, et comment ses épaules bougent lorsqu’il arme, me permettant d’apprendre à lire ses attaques.

Puis nous sommes passés aux défenses, trois mouvements de bras également, d’abord sur place puis en ajoutant les déplacements, le tout sous forme de drills et comprendre la base du travail. Si le drill n’est évidemment pas la réalité du combat, il permet de travailler certains éléments clés qui seront nécessaires par la suite.

Ce travail a duré toute la première matinée, c’est-à-dire trois heures. Pas négligeable mais les détails étaient nombreux et Maul a fait en sorte d’amener chaque pratiquant dans la salle à comprendre les bases les plus essentielles de son travail pour que le reste soit compréhensible. Il n’avait jamais fait ça dans mes stages précédents avec lui, et j’ai trouvé l’approche vraiment remarquable.

Le jour et demi qui ont suivi ont été construits intégralement sur ces quelques points. Aucun autre mouvement de bras n’a par exemple été ajoute et ce avec de très nombreuses défenses sur couteau ou coup de poing. Plus qu’il n’est possible de se remémorer après un week-end, et peu importe car ce qui compte c’est vraiment de comprendre ces bases.

Un véritable jeu d’échecs

La pratique de Maul est un véritable jeu de stratégie et c’est probablement quelque chose que l’on ne peut pas comprendre sans avoir été en face de lui. Deux éléments m’ont particulièrement marque de ce point de vue :

  •   Le travail de base propose permet à Maul de travailler en profondeur sa lecture de son adversaire. Il sait très tôt d’où viendra l’attaque, ce qui donne l’impression qu’il a toujours un temps d’avance. On me dira que si l’adversaire sait dissimuler son attaque, ce ne serait pas aussi facile à faire, et c’est vrai. Maul précise cependant que (au moins dans les premiers niveaux) l’on apprend à gérer un mec « normal » dans une situation de self-défense, pas quelqu’un qui manie le couteau depuis ses 5 ans sur l’ile de Java
  •   Chaque technique utilisée offre deux options à l’adversaire : mourir maintenant ou mourir le coup suivant. Il est impossible de bloquer toutes les opportunités de contre avec une technique parfaite. Partant de ce constat, Maul offre systématiquement UNE opportunité de contre particulièrement visible, qui de fait éclipse toutes les autres possibilités qui ne semblent pas aussi bonnes. Sauf que c’est évidemment un piège tendu, dans lequel nous tombons le plus souvent avec une facilite déconcertante…

Minute culture

Maul s’efforce dans ses stages comme sur le net de partager sa culture, et des éléments contextuels pour comprendre sa pratique et les arts martiaux du Brunei de façon plus large. A l’heure où de nombreux pratiquants ne comprennent pas ce qu’ils pratiquent et pourquoi, ce sont des explications qui n’en sont que plus appréciables.

  

J’ai passé un excellent week-end et je peux dire sans hésiter une seconde que c’est le stage pendant lequel j’ai le plus rigolé en 20 ans de pratique. Et ce même si Maul a sauté sur ma main, me cassant un doigt en route. Je suis impatient de l’avoir à nouveau parmi nous.

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